La pièce commence... On quitte Paris sous la pluie pour retrouver Françoise Sagan à Saint-Tropez après quelques mesures de Brahms... Aimez-vous Brahms? "Ma Sagan" est une femme pleine de vie, robe bleue, sourire hédoniste, elle déplore cette habitude de jouer du Bach aux enterrements pour saluer la mémoire de défunts qui n’auraient pas choisi une musique qui exclut l'excès. Pour cette catégorie d'êtres qui refusent de vivre dans des cadres établis, l'excès n'a pas plus de sens que la norme? "Ma Sagan" est Prune Lichté, rayonnante, la main tendue pour nous faire comprendre la générosité comme conviction. Vivre avec la main ouverte est un concept même si l'écrivain n'est pas éternel comme Sartre, LE Philosophe aimé. Vivre avec la main ouverte, ne jamais la fermer pour s'agripper, ne jamais la fermer par peur, ne jamais la fermer par désespoir, ne jamais la fermer à cause d'un ami qui vous a "tapé de l'argent" ou qui a changé, ne jamais la fermer à cause d'un amour qui vous rend captif et dépendant. La vie se déroule d'ailleurs comme un ruban de cadeaux et de surprises: le décor de voiles tendus évoque l'enfance chérie, les parents exquis, le frère aimé, l'oisiveté et le tapis lamé, la route, la nuit, le jazz et la solitude, le pactole et Bonjour Tristesse! Ce décor m'a rappelé Colette dans "Rêveries de Nouvel an", "Les Vrilles de la vigne": "L’année n’est plus cette route ondulée, ce ruban déroulé qui depuis janvier, montait vers le printemps, montait, montait vers l’été pour s’y épanouir en calme plaine, en pré brûlant coupé d’ombres bleues, taché de géraniums éblouissants, – puis descendait vers un automne odorant, brumeux, fleurant le marécage, le fruit mûr et le gibier, – puis s’enfonçait vers un hiver sec, sonore, miroitant d’étangs gelés, de neige rose sous le soleil… [...] Éloigne-toi lentement, lentement, sans larmes ; n’oublie rien ! Emporte ta santé, ta gaîté, ta coquetterie, le peu de bonté et de justice qui t’a rendu la vie moins amère ; n’oublie pas ! Va-t’en parée, va-t’en douce, et ne t’arrête pas le long de la route irrésistible, tu l’essaierais en vain, – puisqu’il faut vieillir ! Suis le chemin, et ne t’y couche que pour mourir. Et quand tu t’étendras en travers du vertigineux ruban ondulé, si tu n’as pas laissé derrière toi un à un tes cheveux en boucles, ni tes dents une à une, ni tes membres un à un usés, si la poudre éternelle n’a pas, avant ta dernière heure, sevré tes yeux de la lumière merveilleuse – si tu as, jusqu’au bout gardé dans ta main la main amie qui te guide, couche-toi en souriant, dors heureuse, dors privilégiée… » Autour du spectacle: (Cliquez sur l'image pour aller sur le site du Lucernaire) Signature de Denis Westhoff, le samedi 22 septembre à la librairie du Lucernaire. Et le film Bonjour Tristesse sera programmé le jeudi 25 octobre à 20h30 |
AuteurChristelle Abraham Valette Catégories
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January 2015
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